jeudi 25 octobre 2012

Marc Fumaroli - Rhétorique, Classicisme et Otium


J'ai trouvé il y a quelque temps cette interview de  Marc Fumaroli. 
 (à peu près au milieu de la page...)

Je la trouve formidable. Il faut au moins la lire pour goûter la subtilité du français de Mr Fumaroli. La forme de son discours ne cesse de rejoindre son fond. Lors de cette interview, j'ai pu définir quatre messages importants. Permettez moi de parcourir ici cette interview réjouissante. 



 I Eloge de la rhétorique


Selon Marc Fumaroli, la base de son travail, c’est l'étude de la rhétorique, l’art de convaincre. Le premier grand représentant est Cicéron. Puis viennent ensuite les lectures des maîtres grecs, des romains et des médiévaux (venant eux même de St-Augustin, venant lui-même de Cicéron.)
La mode en 60-80, c'est que le littéraire doit tout apprendre des sciences dures. Mais lui préférait les humanités, dont le sujet est l’homme qui ne se connait non par les mathématiques mais par les approximations du langage, par la parole, par les symboles et les signes. L’étude de la rhétorique à travers les siècles révèlent une unité de la sagesse et de l’interactivité humaine (et non des sciences).
Greco-latin surtout, l’art de convaincre est un exercice public et petit à petit devenant privé. Le Moyen age missionnaire l’a ensuite adapté à la prière et à l’examen de conscience. A la Renaissance, la rhétorique greco-latine est adapté dans la société laïque des villes et des cours. La rhétorique des moines médiévaux est adapté au monologue intime des chrétiens. Dès l’antiquité, on observe que l’art de persuader peut se décliner dans les arts. Proportion, convenance, un geste, une figure de pensée (métaphore, synecdoque…) ou un symbole peuvent résumer toute une théologie ou une pensée. Ils permettent encore de rassembler un maximum des facettes du réel.

« Art de mettre en œuvre toutes les cordes de l’esprit et de l’imagination humaine, la rhétorique peut faire dialoguer entre eux les arts du langage, les arts visuels et la musique, leur donnant pour fin commune de surmonter le chaos, le malentendu, le tintamarre, l’incommodité, la violence, et de faire régner une certaine entente, un degré d’harmonie compatible avec les troubles inhérents à la condition humaine. »

Le moyen Age chrétien concentré sur la liturgie eucharistique a poussé très loin cette correspondance des arts entre eux. La renaissance transpose et adapte tout cela pour la gloire du prince, image du Dieu vivant à la tête de l’état.
La rhétorique n’est pas une séduction mais un art et une sagesse, comme un artisanat ayant pour but l’évitement des malentendus et la paix des relations, là où la violence rôde...

Versailles est la matérialisation artistique et institutionnelle de cette passion et de ce sommet qui est la rhétorique française du temps de Louis XIV. Vatican d’un gallicanisme, centre guerrier mais aussi diplomatique, centre d’un pouvoir absolu paradoxalement tendu exclusivement vers une paix générale. Paix européenne et paix des foyers par une administration orientée vers le confort, de l’ordre de sa population. Versailles par ses arts (de la musique, à l’architecture en passant par les rideaux et les jardins) est la métaphore de ce grand désir.

« Et de fait, à ce prodigieux acte de foi dans la bonne volonté royale que fut Versailles répondit la foi des Français dans leur pape-roi,et sans autre révolte notable que celle des Camisards, ils supportèrent les sacrifices que les guerres décidées par le roi, et notamment la plus cruelle, la plus longue (1701-1713) dite de la Succession d’Espagne, confiants qu’ils étaient devenus qu’elles étaient nécessaires à la sécurité future du royaume et à la paix en Europe, dont la beauté de Versailles était comme une promesse. C’était un formidable édifice de fiction, mais cet édifice fut conçu en accord avec une expérience millénaire, tant antique que chrétienne, de la nature humaine et des moyens de conférer un sens plausible à son histoire terrestre. Cet édifice de fiction harmonisatrice créa pendant un demi-siècle le terrain commun où s’entendirent tous les Français. »



Cette clarté française a pu paraître comme un paradis perdu, Jean Paulhan dans les fleurs de Tarbes, oppose cet art de la conversation sans malentendu (mais aussi art de consensus autour de critères et de convention) à la « Terreur moderne » né de Rousseau où il faudrait se délivrer du commun pour « communiquer » qu’à partir de soi son ineffable expérience subjective.
Fumaroli s’aide aussi de Levi-Strauss qui en partant de ses études des « primitifs » découvre des niveaux de complexité rhétorique n’ayant rien à envier aux civilisés. Finalement, Levi-Strauss et Paulhan partant tous les deux paradoxalement de Rousseau dans le sens inverse se retrouvent dans la critique d’une modernité se croyant civilisé mais finalement sauvage d’une destruction de ses racines communicationnelles et donne l’illusion à chacun d’être « un commencement absolu ». En refusant la rhétorique, l’homme devient un gibier de la manipulation (divertissement et publicité.)

II Classicisme Français ?

Qu'est ce que c'est ? C’est certes la centralisation versaillaise, mais c’est aussi tous ces artistes, penseurs écrivains qui demeurent malgré la fin de cette époque, qui lui ont même échappé pour aller à l’universel

« Ces écrivains et ces artistes, chacun à sa façon singulière, et dans un langage qui pour nous Français, en dépit de l’évolution de notre langue et de notre regard, reste étonnamment limpide, lisible, audible, délicieux, s’adressent à nous, à notre conscience et à notre liberté d’une façon immédiate. Ils nous font participer à une conversation intense qui nous touche et qui nous grandit, alors même qu’elle nous rappelle sans cesse combien il est difficile, quoique enthousiasmant, d’être digne, d’être libre, d’être heureux, d’être sage, d’être généreux, et combien il est facile de nous laisser aller à la pente inverse et de nous rendre odieux et malheureux. Ils tiennent ouverte une école d’humanité par laquelle il est fort souhaitable d’avoir fait ses classes. »



Les barrières entre nous et eux ? D’abord un certain pédantisme érudit, un utilitarisme éducationnel (marché du travail et c’est tout ?) Tout nous conduit à l’atrophie de notre mémoire littéraire qui mène elle-même pourtant au tribalisme et souvent même à l’incompréhension d’œuvres plus récentes.

III Initiation à l’otium

Fumaroli commence par regretter l’omniprésence des images. Nos mémoires, nos imaginations sont conditionnées à une source extérieure et inclines à la dispersion de l’attention et à la consommation et donc conduit à une absence de construction personnelle, de repères.
Trop d’écran, de vitesses et perte de gout pour la lecture et de la contemplation. Or l’école ne fait pas contrepoids. Fumaroli appelle à un retour aux intentions même des pédagogues humanistes du XVIIIe, créer des personnalités fortes à la volonté libre sachant lire un texte littéraire exigeant et goûter une œuvre d’art.
« Dans une démocratie digne de ce nom, chaque enfant est un petit prince, non par les gâteries, mais par l’éducation qui le prépare à se gouverner lui – même, afin de n’être l’inférieur de personne parmi tous les autres. »
Il prend l’exemple de Fénelon, précepteur du duc de Bourgogne, petit fils de Louis XIV présentant deux œuvres de Poussin, les funérailles de Phocion et Diogène jetant son écuelle. Beauté plastique, beauté des paysages mais cependant des drames se niche dans leur détails (l’expulsion d’un bouc-émissaire, le refus du moindre des conforts pour un philosophe.) Enseignement subtil de l’humilité, du soupçon des gloires et des richesses et de l’ombre tragique de la vie.


Fumaroli introduit la notion d’otium. Venant de Cicéron et développé par Sénèque, elle n’est pas la passivité mais le retrait  de l’agitation quotidienne par la contemplation intérieure et extérieure. Savoir bien prendre de la distance afin de mieux revenir vers la foule et les sujets de l’actualité. Mais toujours aller vers l’essentiel. Tout dans notre monde moderne nous éloigne de cette notion, même ce qui devrait nous y conduire. (loisirs, vacances, amitiés, amours). Tout est jetable et on nous vend une vie hâtive « qui ignore la saveur du vrai repos, la douceur des lentes joies du cœur, les haltes et les mesures dont ne peut se passer la volupté. »

A l’inverse de l’otium est la consommation, impératif brûlant de la religion de l’abrutissement empêchant tout détachement et intimité. Nous nous croyons dynamique, nous ne sommes que rouage, « nous ignorons le contrepoids intérieur qui permettrait de nous soustraire à cette roue, et qui nous donnerait le temps de regarder, d’écouter, de sentir, de goûter, d’aimer, de nous faire aimer. C'est toute une longue cour attentive au sens érotique du terme qu'il faut faire aux êtres et aux choses pour les connaître vraiment et se faire connaître et apprécier d’eux. »
Nous devenons des atrophiés des relations humaines, notre papillonnage éreinte nos possibilités d’amour, de fidélité, de loyauté, de confiance, de tendresse.


Compagnon de l’otium est l’eutrapélie, la disposition d’humeur heureuse, notion hellénique transporté dans la théologie morale chrétienne, joie contagieuse (que l’on retrouve dans l’art à partir du XIIIe) qui a été laïcisée par la renaissance. Bref, tout le contraire de nos foires d’art contemporain.

IV Phineas Barnum, père spirituel de l’art contemporain

Enfin, Fumaroli cherche à comprendre l’art contemporain avec nous. Il le cherche dans sa relation avec l’argent et le marché. S’il y a toujours eu une économie des œuvres d’art, c’était dans le passé plus une affaire de donateur, de mécène, de l’Eglise, de prince, d’état qui soustrayait l’œuvre au marché. Les artistes ont pu ainsi quitter l’atelier de l’artisan mais aussi la boutique pour trouver la noblesse de leur métier dans leur atelier et les musées. Les romantiques ont senti la menace de l’argent et se sont défendu en plaçant l’art au niveau d’une religion, d’un absolu à protéger du commercial et du marché tout en en faisant trop. Finalement le modernisme au départ a été fidèle à cette idée sacrale de l’art, en amplifiant la dimension sacré de l’art (contre l’art académique vendu aux bourgeois) pour lutter contre les marchands du temple pourtant leur propres clients. Marcel Duchamp est peut-être le premier à s’être moqué de cette foi, il a toujours trouvé des admirateurs de son rien que les musées exposant suffisait à transfigurer en œuvre d’art.

C’est dans ce sens, que l’art moderne est le fils de Phineas Barnum, directeur de cirque et maître en communication. Puisque les gens aiment être charlatanisés, mystifions les ! C’est la psychologie du marché-roi.
« Le mystificateur, le prestidigitateur, sont des héros modernes, de rien ils savent tirer un grand profit, en dupant les naïfs ébaubis. »


Fumaroli voit la barnumisation de l’art s’envoler à partir de 1960, académisme mercantile et épate bourgeois. On essaie de faire des ponts entre les chefs d’œuvres de ce passé et cette nouvelle tradition… Mais c’est de plus en plus difficile à croire que nous tenons là les fils de la grande tradition.

En conclusion…
Quel espoir contre la pollution artistique ?
Prendre conscience de la pollution communicationnelle même si moins visible que la communication écologique. Méfions-nous des publicités, des injonctions à communiquer, de la nouveauté pour la nouveauté. Redialoguons avec le passé avec ce qu’il nous a laissé de meilleur, brisons l’idole du contemporain, connaissons nous nous même. Nous redécouvrirons peut être ainsi les sagesses personnelles, les méthodes d’éducations expérimentées afin de redevenir des personnes libres, prudentes et inventives.

conclusion de Marc Fumaroli

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La défense du classicisme par Fumaroli me comble toujours, sa défense de la rhétorique nous invite à une réflexion sur la forme de notre communication, de la puissance des mots et des arts et de la merveille de l'homme conscient de ces trésors fragiles qu'est l'homme classique. Rhétorique, le chemin naturel de l'homme sage, rationnel et sensible, pour ne pas dire de l'homme religieux dans son sens le plus large. Un chemin vers la liberté et l'unité.

Sa réintroduction du terme Otium est pour moi une révélation. Cela me permet de mettre un mot sur une passion personnelle et de caractériser aussi l'objectif de ce blog.
Merci Mr Fumaroli.



Pour développer la notion d'otium, voici une très bonne fiche de lecture de son dernier livre qui développe cette notion. "Paris-New-York et retour"


Et enfin, une fiche de lecture des Fleurs de Tarbes de Jean Paulhan.


lundi 22 octobre 2012

dixit Dominus - Psaume 110 et Haendel


J'écoute souvent le dixit dominus de Haendel, j'aime imaginer le jeune Haendel en Italie et le voir envoyer cette œuvre aux gens qui l'emploient, aux curieux, au musiciens locaux. Tout dans cet œuvre dit : Je vais vous impressionner !!! Attention, j'arrive !!!!
Je vous propose une version coréenne !! Peut-être pas la meilleure mais toujours émouvant de voir une culture se prendre de passion pour une autre.





Vous trouverez les paroles ici
C'est celle du psaume 110. Je trouve d'abord qu'elles sont décousues et relativement incompréhensible, ce marchepied, ce sceptre, cette rosée, ce torrent où il relève la tête. Mais que se passe t il ?

Partout, il est annoncé que c'est un psaume de David, un psaume de couronnement et messianique.
Curieusement, je repense à cette  note précédente sur le messie de Haendel.
Tous les commentaires sont d'accord, il faut découper le psaume en deux. (de 1à 3, de 4 à 7) C'est un psaume qui rejoint deux textes de prières d'acclamation du messie, d'intronisation de roi.
Curieusement, c'est aussi le psaume le plus cité dans le nouveau testament ? (à ma droite... ou encore l’épître aux hébreux réfléchissant sur la figure de Jésus, grand prêtre dont nous avions besoin (Melchisedek).)
Saint Augustin dit tout simplement que c'est une prophétie de Jésus.
Peut on voir ici un texte ironique d'un point de vue neo-testamentaire.
Tout n'était donc qu'à double sens? Ou bien était ce un saint subterfuge ?
Saint Augustin est d'accord avec moi....


"Que le Fils unique de Dieu viendrait chez les hommes, qu'il prendrait notre chair, qu'il deviendrait homme par cette chair qu'il aurait prise, qu'il mourrait, qu'il ressusciterait, qu'il monterait au ciel pour s'asseoir à la droite de son Père, accomplissant ainsi ses promesses à l'égard des Gentils, [...] voilà ce qu'il fallait prophétiser, ce qu'il fallait annoncer, l'avènement qu'on devait prêcher, afin qu'il ne causât aux hommes ni frayeur ni surprise, mais qu'il fût attendu avec foi. Parmi ces promesses, il faut compter notre psaume, qui annonce Jésus Christ notre Seigneur d'une manière claire et évidente; en sorte qu'il est indubitable pour nous que ce psaume est une prophétie du Christ."
(Commentaires sur les Psaumes, III, Roma 1976, pp. 951.953)
Ainsi le marchepied, le sceptre de ta puissance ne sont ils pas des signes de la croix?
Il brise des têtes, il brise des rois. Cela rejoint le magnificat de Marie et indique la remise en cause absolue du Christ de la notion de pouvoir.
Enfin Saint Paul dans sa première lettre au Corinthiens relie cette violence à la défaite de la mort. Psaume de résurrection ? Oui, il est en effet chanté tous les dimanches dans la liturgie des heures.

La version de Haendel me parait tout à coup bien curieuse après ces investigations... Il me semble que Haendel utilise ce psaume pour parler de sa propre venue messianique dans le monde de la musique... Attention, j'arrive donc et je vais tous vous ridiculiser et prendre votre musique comme un marchepied.... C'est très ambitieux et conquérant.
On peut aimer aussi des versions plus douces comme celle de Vivaldi et de Scarlati.


Source sur le psaume .... ici ou la



vendredi 12 octobre 2012

Détestez la mauvaise musique, ne la méprisez pas - Proust et exemples personnels

Détestez la mauvaise musique, ne la méprisez pas. Comme on la joue, la chante bien plus, bien plus passionnément que la bonne, bien plus qu'elle s'est peu à peu remplie du rêve et des larmes des hommes. Qu'elle vous soit par là vénérable. Sa place, nulle dans l'histoire de l'Art, est immense dans l'histoire sentimentale des sociétés. Le respect, je ne dis pas l'amour, de la mauvaise musique, n'est pas seulement une forme de ce qu'on pourrait appeler la charité du bon goût ou son scepticisme, c'est encore la conscience de l'importance du rôle social de la musique. Combien de mélodies, du nul prix aux yeux d'un artiste, sont au nombre des confidents élus par la foule des jeunes gens romanesques et des amoureuses. Que de "bagues d'or", de "Ah! Reste longtemps endormie", dont les feuillets sont tournés chaque soir en tremblant par des mains justement célèbres, trempés par les plus beaux yeux du monde de larmes dont le maître le plus pur envierait le mélancolique et voluptueux tribut - confidentes ingénieuses et inspirées qui ennoblissent le chagrin et exaltent le rêve, et en échange du secret ardent qu'on leur confie donnent l'enivrante illusion de la beauté. Le peuple, la bourgeoisie, l'armée, la noblesse, comme ils ont les mêmes facteurs porteurs du deuil qui les frappe ou du bonheur qui les comble, ont les mêmes invisibles messagers d'amour, les mêmes confesseurs bien-aimés. Ce sont les mauvais musiciens. Telle fâcheuse ritournelle que toute oreille bien née et bien élevée refuse à l'instant d'écouter, a reçu le trésor de milliers d'âmes, garde le secret de milliers de vies, dont elle fut l'inspiration vivante, la consolation toujours prête, toujours entrouverte sur le pupitre du piano, la grâce rêveuse et l'idéal. tels arpèges, telle "rentrée" ont fait résonner dans l'âme de plus d'un amoureux ou d'un rêveur les harmonies du paradis ou la voix même de la bien-aimée. Un cahier de mauvaises romances, usé pour avoir trop servi, doit nous toucher, comme un cimetière ou comme un village. Qu'importe que les maisons n'aient pas de style, que les tombes disparaissent sous les inscriptions et les ornements de mauvais goût. De cette poussière peut s'envoler, devant une imagination assez sympathique et respectueuse pour taire un moment ses dédains esthétiques, la nuée des âmes tenant au bec le rêve encore vert qui leur faisait pressentir l'autre monde, et jouir ou pleurer dans celui-ci.



Marcel Proust, Extrait de "Les plaisirs et les jours", Chapitre XIII


Je ne sais plus où j'ai trouvé ce texte...

Il parle aussi des bonheurs de la mauvaise musique, de la gloire qui passe, malgré tout, à travers elle. Veuillez trouver quelques exemples (très) personnels plus bas. Rendons gloire à Aznavour, Misraki, Ferrat, Gainsbourg et quelques autres.... Leur "mauvaise musique" m'ont soigné, adouci ou encore évoque mille moments, émotions ou vertus...

Reda Caire chantant Paul Mizraki, le petit souper aux chandelles, insensiblement, dix sept ans. Le miracle de la rencontre et un peu de nostalgie.



Kaja Mianowana chantant Skąd czułość poême de Marina Tsvetaeva traduit en polonais... La surprise de la douceur rencontrée

Ferrat chantant Que serais-je sans toi d'Aragon. Le chant de l'amoureux

Bibi, tout doucement, chanson évoquant la chaleur maternelle pour une chanson de la tragédie d'une séparation acceptée.

Aznavour chantant une vie d'amour. L'idéalisme du premier amour qui comblerait la vie



Delerm et Cali chantant quoi... de Serge Gainsbourg. Le désespoir d'une séparation et l’ambiguïté fatale de l'amour.

Roza Rymbaeva, l'amour à nouveau possible et rencontré

Chanson populaire chanté par Claude François. Relativité scandaleuse et pourtant effective du grand amour vécu et juste mort...

Alain Soral et le populisme

En 2006, Alain Soral donne une interview  à un jeune journaliste web. La vidéo est plus bas, je vous propose un petit résumé d'une partie de cette interview et deux trois commentaires...

Alain Soral annonce qu'il est prêt à s'offrir aux politiciens pour leur dire pourquoi cela ne marche plus, pourquoi ils ne sont plus crédibles car ils ne comprennent plus rien. L'interviewer dit que ce n'est pas le problème des politiciens. Soral réplique que le pouvoir, c'est la maîtrise de la situation, de la réalité et donc sa compréhension en avance.
C'est cela prévoir et être un véritable intellectuel.
Aujourd'hui, le chantage au fascisme fait de moins en moins peur et les politiques ont perdu le réel.
L'interviewer dit que pourtant Sarkozy va surement passer en 2007.
Oui, répond Soral,  il a tout les réseaux, argent, média etc... il a doublé Chirac, l'ancien homme des réseaux.
Sarkozy a travaillé sur la concentration des réseaux. Et il a compris l'envie française de populisme light. (L'homme politique giscardien arrive à sa fin.) Mais c'est de la forme. Et il a promis à tout le monde... Soit il trahit, soit il ne fait rien et de toute façon, il conduit à la catastrophe qui est le chemin logique de la politique française. Il aura un peu de temps de grâce avec charisme pendant deux ans, il ne pourra rien faire avec les syndicats ou les puissances d'argent. Puis il se retrouvera nue. Et ensuite, il n'y a plus personne. Le Pen sera à la retraite, or c'est lui qui stérilisait le populisme français par sa diabolisation et son lien avec "la collaboration et l'extrême droite condamnable". Mais après ? Le populisme pourra devenir ce que Michéa en dit (Rousseau). On quittera alors des schémas de 1945 et de 1968 et redéfinir la politique. La redéfinir car la colère populaire se développe et le système politique réduit cette colère en un populisme et ce populisme en fascisme, permettant de ne pas répondre aux racines profondes de la crise.
Le populisme national a un grand avenir en France.




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Ce n'est pas un sans faute, mais je dois avouer que la perspective n'est pas mal du tout. Il est intéressant de découvrir cette interview maintenant. Il s'est passé beaucoup de choses entre temps, et l'homme a été cohérent sur toute la ligne, ses débuts, son "think tank", ses conférence, son "gauche du travail, droite des valeurs" (= populisme), son passage au Front national (velléités de pouvoir ? Peut-être quand on voit comment Marine Le Pen l'a mis sur la touche), son site, ses sites commerciaux etc... Cet homme regroupe autour de lui une haine et une adoration étonnante. Il est ce gouailleur de groupe de copains qui, lors d'une conversation politique "emporte le morceau" par ses arguments, sa hargne et une autorité naturelle créé par sa culture et son courage. Tout seul, ensuite, on se demande s'il est sérieux et si on ne devrait pas prendre ses distances... Mais on revient tout de même, car nous sommes tous fascinés  (en tout cas moi, j'ai cette faiblesse) par les hommes de système, les experts en mécanique intellectuelle, les ceintures noires de dialectique et les chevaliers agressifs et honnêtes de leurs causes. 

Une incarnation d'un populisme à la française refusant le système politique et se concentrant sur la formation et la transmission d'un arsenal intellectuel ? J'ose croire que le bonhomme ne renierait pas cette définition. 

Et moi, ce populisme ? 
Mais qu'est ce que le Peuple ? N'y a t il rien de plus séducteur comme notion, n'est ce pas la base de la démocratie comme celui de la dictature ?

Il n'y a pas d'exercice de l'autorité sans l'adhésion du peuple. 
Plus le tyran est démagogue, plus le peuple est fort. Mais on n'est plus tyran seulement avec un costume ridicule et une armée. Ce n'est plus suffisant. Les dictateurs d'opérette se font de plus en plus rare. (L'ingénierie du consentement est de plus en plus subtile.)
L'autorité ne peut que rarement se passer de l'autorité d'un seul (la monarchie n'est jamais loin non plus), impossible aussi d'échapper à l'influence dans le gouvernement de ceux qui produisent la richesse d'un groupe. (la ploutocratie, n'est jamais loin). La démocratie est aussi ce règne du peuple, à la recherche d'une mise en oeuvre organisée d'une société humaine bien maîtrisée et raisonnable.

Bref, rien n'est fixée, et il y a toutes les formes de régime politique dans chacun des régimes sur terre. 
La différence entre la démocratie et la tyrannie la plus noire se fera moins sur les structures que sur la simple constatation que ce sont des hommes libres, raisonnables et bons qui sont dans les structures... Et même encore, tout peut dépérir.... C'est une lutte de tous les instants contre cette déchéance morale et physique. (le péché originel ?)

Alors le populisme célino-soralien, notre régime démocrato-européen ? Invitent-t-ils, font ils des hommes libres, raisonnables et bons ? 
Le lien entre pouvoir et jouissance est elle une finalité ?

Toute politique commence par une réflexion sur ce "qu'est ce qui est bon, raisonnable et ce qu'est un homme libre?"

Puis je affirmer que cette réflexion est insuffisante à notre époque ? Ou plus précisément que nous croyons y avoir répondu ? N'avons nous pas oublié que tout dépérissait ?



Je conseille enfin cet article de Yves-Charles Zarka paru dans libération en Janvier 2012 et dont je partage souvent l'avis

le populisme n’est donc pas le fait d’un seul parti mais de la plupart. Pour le dire d’une phrase : le populisme devient un mode dominant du rapport aux citoyens dans des démocraties qui ont perdu le sens de la délibération publique.

N'est ce pas ce que dit Soral ? Dans un monde politique où tout est populisme, les électeurs ne vont ils pas finir par préférer l'original aux ersatz....

mercredi 10 octobre 2012

Girard et l'illusion de notre autonomie

"La lucidité de notre époque sait reconnaître la présence du sacré dans les désirs qui paraissent les plus naturels. La réflexion contemporaine découvre des « mythes » et de la « mythologie » dans chacun de nos désirs. Le XVIIIe siècle démystifiait la religion, le XIXe siècle démystifiait l’histoire et la philologie, notre époque démystifie la vie quotidienne. Pas un désir n’échappe au démystificateur patiemment occupé à construire sur tous ces cadavres de mythes le plus grand mythe de tous, celui de son propre détachement. Lui seul semble-t-il, ne désire jamais. Il s’agit toujours, en somme de convaincre les autres et surtout de se convaincre soi-même que l’on est parfaitement et divinement autonome" dans Mensonge romantique et vérité romanesque René Girard

Voici une des invitations les plus pressantes de René Girard pour comprendre l'homme et soi même : il faut arrêter de se penser autonome dans ses désirs et donc arrêter de convaincre les autres et soi mêmes que nous le sommes. Notre lucidité, notre autonomie de désir que nous portons comme un saint sacrement, n'est qu'une idole. 
Démystifions mais ne soyons pas dupe.... Sachons dire que nous ne savons pas désirer et que notre recherche "d'être" est la plupart du temps trompeuse. 
Pour cela, moi bête catholique, je ne vois pas de meilleur exercice que l'adoration eucharistique, apprendre à être aimé du Christ...

En écrivant ce texte (1961), Girard pense certainement à Roland Barthes et à ses "mythologies". C'est pourquoi, je rappellerai aussi cette phrase de Barthes écrit sur son carnet personnel peu de temps après la mort de sa mère en 1977.
Tout d’un coup, il m’est devenu indifférent de ne pas être moderne.
Cette phrase est peut être le signe d'une conversion. Pourquoi faire croire que suis autonome ? Notre relation avec nos mères ne nous montre pas d'abord que nous sommes d'abord un mystère pour nous-mêmes. 
Et les autres le sont tout autant...
Quelle merveille...




lundi 8 octobre 2012

Fellini Satyricon

"Le monde antique, me disais-je, n'a jamais existé, mais, indubitablement, nous l'avons rêvé." 
"La Rome de la décadence ressemble beaucoup à notre monde actuel, avec cette frénésie obscure de jouir de la vie, la même violence, la même absence de principes, le même désespoir, la même vanité"
"est-il vraiment possible d’effacer de notre conscience deux mille ans d’histoire et de christianisme, de tenter d’imaginer les mythes, les attitudes, les coutumes d’ancêtres si éloignés, sans ne faire un objet de complaisance moraliste, sans les juger, sans réserves critiques, sans inhibitions psychologiques ni préjugés ? Sans doute cela n’est-il pas possible ; mais je veux tout de même essayer." Fellin
i


 


D’où venons-nous ? Où allons-nous ?

Fellini reprend l’œuvre de Pétrone, du premier siècle de notre ère. Œuvre poétique, vulgaire, pornographique de la vie de jeunes étudiants nobles romains errant dans l'empire. Œuvres fragmentaires qui part dans tous les sens à travers différentes histoires où nous perdons de vue l’histoire cadre. Cette sensation demeure dans le film. Fellini, ne pouvant tout garder, a beaucoup sélectionné, tout en voulant, je crois, préserver l’impression de sa lecture.
Que histoire voyons nous ? L’histoire est centré sur un jeune étudiant noble déclassé, on le suivra à la recherche de son jeune esclave amant perdu, vivre un chagrin d’amour, disserter sur l’art et la poésie  avec le poète Eumolpe qui l’emmène au festin de Trimalcion, formidable orgie où nous méditons sur les affranchis, partant ensuite à la campagne, notre héros retrouve Giton et son rival Ascylte et se retrouve esclave sur un bateau de chaire fraiche pour Rome, il se marie avec le capitaine,  mais il y a un coup d’état à Rome, notre héros se retrouve auprès du minotaure, (sans avoir oublié le coup de l’hermaphrodite) là encore il devient le héros d’une fête, mais il a perdu son « glaive »…, il part à sa recherche auprès d’une magicienne. Guéri, il prend part à l’enterrement d’Eumople. Mais, non, lui, il ne le mangera pas… L’histoire continue mais s’arrête brutalement au milieu d’une phrase.

Décousu ? Incompréhensible ? Non, non,  fragmentaire, incroyablement cohérent même s'il faut déjà quelque fois se battre pour comprendre la logique d’un fragment…

Nous nous sentons incroyablement étranger à tout ce qui se passe. Fellini promène sa caméra sans jugement mais en étonné. C’est un voyage incroyablement dépaysant qu'il nous propose alors. Tel est son pari, selon moi : nous faire visiter l’antiquité romaine dans sa matérialité et son dépaysement. Nous faire comprendre que l’antiquité, ce n’est pas nous avant, mais un monde qui nous est devenu en partie étranger. Des rapports humains différents, des visages, des maladies, des histoires, des individualités, des couleurs, des religions, des brigands, des histoires, un rapport à la religion, à la vie, à l’enfance, à la liberté, à la philosophie. Tout est différent et il veut nous le planter au marteau !!! Non, l’antiquité, ce n’est pas ce que vous croyez. Certes, il y a le droit, la justice romaine, l’art oratoire mais d’abord, c’est les bidonvilles romains rempli de sexe, d’homosexuels, de sang, de vengeance, d’esclaves,  d’oisiveté, d’injustice, de violence, d’impulsivité, de danse, de folie (mais ce ne sont pas exactement les mêmes que chez nous…), de travail, de sagesse quelque fois. Pourquoi, suis je si enthousiaste ? Pourquoi, j’y crois et que je serai déçu si l’antiquité ne ressemblât pas à celui de Fellini ? Car, c’est un homme qui a pris au sérieux le texte de Petrone, (« San Antonio de l’antiquité ») qui le prend au sérieux dans son époque, sur la réflexion sur la jeunesse déclassée, sur les bouleversements humains des affranchissements, sur la religiosité de son époque, sur la folie aussi. (cela veut peut être dire que la folie n’est pas dans l’écrivain mais dans ce qu’il observe de son époque ??) Et ensuite, Fellini, en fait un message (ou plutôt des questions) pour notre temps, comprenons nous bien le passé, savons nous d’où nous venons, (changez de paradigme comme on dit maintenant…) oubliez votre perspective et pensez à un monde occidental sans christianisme. Et pensez à notre monde qui rejoint celui de l’antiquité par son absence de questionnement sur le péché (rf phrase de Fellini….). Le moment où le héros est dans la pinacothèque est un saisissant effet de profondeur sur notre époque incapable de connaître les trésors du passé et donc incapable de savoir là où elle va. Oui, les orgies, l’affranchissement anarchique, l’homosexualité, la violence, l’oisiveté est aussi la notre quand bien même nous voyons tout cela comme des étrangers…. Dépaysement et découverte de notre proximité.



Ce ne sont pas seulement de vieilles mosaïques que nous observons mais un questionnement sur le sens de l’humanité par une plongée dans une œuvre du passé, d’où venons nous ? où allons-nous ? Peut-on ignorer le Christ ?

A revoir et revoir et s’émerveiller devant chaque plan… 
Il y aurait encore tellement à dire... Sur chaque passage...




A noter
Beauté plastique des hommes, ouvirers, étudiants, combattants,
Ciel figé
Décor de studio, aussi artificiel que réel
Histoire de la veuve, d’Oenothée,
Festin incroyable, four, ours, cochon
Le spectacle grec, égratignement, d’un monde que l’on ignore encore en croyant le connaître.
Combat omniprésent, meurtre, sang
Trognes, visages, nains, gros nibards,
Fresques, sculpture, rendre l’antique moderne dans son temps présent
La mort de l’hermaphrodite
Couple noble se suicidant, jeux dans leur domus ensuite
Spectacle théâtrale du début
Rire du minotaure qui le sauve et fête du rire suivant ce rire, humiliation de l’impuissance
Humiliation du chagrin d’amour
Incroyable giton
Et incroyable Ascylte, partout. Rival souriant, toujours présent, toujours obstacle et humiliant, girardien
Que de visages, que de visages, de foules, même les petits rôles, les visages vus une seule fois sont incroyablement convaincants.

La page wikipedia sur l'oeuvre de Petrone est très riche, à lire pour les plus curieux.
En streaming, il y a une version sous titrée en espagnole qui traîne sur youtube mais je crois que c'est un film qui mérite de l'attention et de bonnes conditions pour le regarder et en jouir du mieux possible.

vendredi 5 octobre 2012

la petite fille rousse de Chesterton


Voici la toute fin du livre "Le monde comme il ne va pas" de Gilbert Keith Chesterton.
Mon manifeste d'une politique, d'une philosophie où l'homme ne serait plus la variable d'ajustement... Puis une invitation à relire ainsi qu'à faire découvrir cet auteur qui ne cesse de me nourrir

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Cette parabole, ces dernières pages, et même, toutes ces pages, visent à démontrer que nous devons tout recommencer, à l’instant, et par l’autre bout. Je commencerai par les cheveux d’une petite fille. Ça  je sais que c’est bon dans l’absolu. Si mauvais que soit le reste, la fierté d’une bonne mère pour la beauté de sa fille est chose saine. C’est l’une de ces tendresses inaltérables qui sont les pierres de touches de toutes les époques et de toutes les races. Tout ce qui ne va pas dans ce sens doit disparaître. Si les propriétaires, les lois et les sciences s’érigent là-contre, que les propriétaires, les lois et les sciences disparaissent. Avec les cheveux roux d’une gamine des rues, je mettrai le feu à toute la civilisation moderne. Puisqu’une fille doit avoir les cheveux longs, elle doit les avoir propres, elle ne doit pas avoir une maison mal tenue ; puisqu’elle ne doit pas avoir une maison ma tenue, elle doit avoir une mère libre et détendue ; puisqu’elle doit avoir une mère libre et détendue, elle ne doit pas avoir un propriétaire usurier, il doit y avoir une redistribution de la propriété ; puisqu’il doit y avoir redistribution de la propriété, il doit  avoir une révolution.
Cette gamine aux cheveux d’or roux (que je viens de voir passer en trottinant devant chez moi), on ne l’élaguera pas, on ne l’estropiera pas, en rien on la modifiera ; on ne la tondra pas comme un forçat. Loin de là. Tous les royaumes de la terre seront découpés, mutilés à sa mesure. Les vents de ce monde s’apaiseront devant cet agneau qui n’a pas été tondu. Les couronnes qui ne vont pas à sa tête seront brisées. Les vêtements, les demeures qui ne conviennent pas à sa gloire s’en iront en poussière. Sa mère peut lui demander de nouer ses cheveux car c’est l’autorité naturelle, mais l’empereur de la planète ne saurait lui demander de les couper. Elle est l’image sacrée de l’humanité. Autour d’elle l’édifice social s’inclinera et se brisera en s’écroulant ; les colonnes de la société seront ébranlées, la voûte des siècles s’effondrera, mais pas un cheveu de sa tête ne sera touché.
P196, ed."l'age d'homme" Le monde comme il ne va pas  G.K. Chesterton

mercredi 3 octobre 2012

Fabrice Hadjadj à l'Unesco - Quel transhumanisme ?

En 2011, l'église catholique a lancé un test, une campagne... (je ne sais comment appeler cet objet non identifié...) Le parvis des gentils. L'esprit est de revenir dans les discussions intellectuelles, de sortir un peu de l'église dans laquelle la société occidentale a contraint l'Eglise et de dialoguer, de dire finalement "nous avons notre mot à dire", discutons !

Un moment important de cette rencontre fut le lancement à l'Unesco. Sous le haut patronage de l'idée de dialogue interculturel, eu lieu cette rencontre très diplomatique d'apparence, polie, correcte, bien comme il faut. (le témoignage de Pavel Fischer à 1:25:30 ci dessous n'est pas dénué d'intérêt pourtant...)
C'est ici que Fabrice Hadadj apparaît. Et donne son discours. Qui par bien des aspects, doit sonner comme un coup de tonnerre. Je vous propose un résumé (peut-être trop long...)


1) Qu’est ce que je fous là ? Pour me montrer tolérant et bon dans le monde assoupi du protocole ? Je ne viens pas provoquer, mais je viens avec une question. La question de chaque homme. S’interroger sur les raisons de vivre… Avec au cœur ce paradoxe, ce désir d’amitié, de communion et ce savoir de la décrépitude humaine.
2) Ce questionnement est le propre de l’homme, Le singe n’est pas pantois devant la vie.  (De fait nous ne sommes pas à proprement parlé de grand singe) L’émergence de l’homme n’est pas du à son adaptabilité mais bien au contraire, c’est un grand inadapté qui se pose des questions. Peu d’instinct, il cherche le sens. Il veut un dépassement de la vie par son intensité,  dans la réussite de ses relations. Pascal : L’homme passe infiniment l’homme.
3) Ce questionnement sonne étrangement en cette période de crise anthropologique. Période unique où tout cri de retour à l’humanisme sonne creux. On ne peut pas fonder un humanisme sur l’homme. Car l’homme a besoin d’une espérance qui le dépasse. L’homme a besoin de raisons pour donner la vie et non pas continuer le cercle infini du pourrissement. L’homme cherche des raisons de vivre au delà de lui-même, une joie qu’il ne possède pas encore en plénitude. Comme dit Dante, l’homme est fait pour « transhumaner ».
4) Tiens ! Transhumanisme n’est il pas une notion développée par Julian Huxley, biologiste et premier directeur de l’Unseco , Mais le sens de ce mot pour les deux auteurs est très différent mais ces deux  possibilités expriment le choix de l’humanité actuelle. Or, le frère du fameux Aldous était eugéniste (« partie intégrante de la religion de l’avenir ») bien qu’il ait été antinazi et social démocrate.
Hadjadj ne veut pas faire son procès mais comprendre la globalité de l’idéologie présente. La rédemption de l’homme par la technique. Citation de Julian Huxley : « La qualité des personnes, et non la seule quantité, est ce que nous devons viser : par conséquent, une politique concertée est nécessaire pour empêcher le flot croissant de la population de submerger tous nos espoirs d’un monde meilleur. » Le better world de Julian et le Brave new world (le meilleur des mondes) sont proches. Homme vu comme un produit fabriqué à la chaîne où la déficience est éliminée.





















5) Comment donc accomplir cet appel au « trans » ? Par la technique et la manipulation génétique ? Par la culture, l’ouverture au transcendant ?  De ce fait, l’Unesco est ambiguë (comme son premier président) car elle travaille pour la culture mais comme instrument technocratique, elle ne pense que problèmes à résoudre et non mystère à reconnaître.
De toute façon, un transhumanisme où l’homme serait le producteur, en est ce vraiment un ? Et puis la merveille de l’homme est dans le mystère de sa présence étonnée (l’épiphanie de son visage) non dans sa performance.
6) Nous sommes à un moment dangereux donc car tout devient possible mais aussi la possibilité renouvelée d’accueillir notre humanité, l’élévation verticale de notre parole.
Le parvis des gentils (Dialogue croyants et non-croyant? Non, trop limité, seulement des hommes qui se rencontrent avec leurs questions.) invite (et donc les institutions catholiques) à réfléchir à la question de l’homme au moment où tous ces chemins sont face à nous. Et si possible de reconnaître que l’homme est d’abord un réceptacle qui rend grâce à la source mystérieuse.

Pour ceux qui veulent écouter : aller à 2:01:05 sur la vidéo (après Hadjadj, il y a aussi un témoignage de Jean Vanier)


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Transhumanisme.... Hadjadj semble dire que tous les hommes sont Pascaliens et proche de Dante, l'homme dépasse l'homme. Tous les hommes ressentent cette vocation. (Désir d'être dirait Girard ?) Une certaine modernité interprète ce désir par l'intermédiaire de la technologie et de la sélection humaine. elle veut résoudre le problème.(Unesco)
Est ce que toute résolution de ce problème par des solutions non transcendantes conduit à un inhumanisme (thèse de l'auteur) ?
L'auteur nous invite enfin à être des étonnés et non des technocrates...
Comment ne pas le suivre ?