samedi 22 février 2014

La mariée était en noir François Truffaut

La mariée était en noir 1967 François Truffaut

Idéal de vengeance ou vengeance d’idéal
Au début, on ne sait pas vraiment, une femme est malheureuse. Elle part. En sus de sa famille, elle va commencer à assassiner des hommes. Précisément, avec imagination et obstination. Nous apprendrons au fur et à mesure qu’elle souhaite tuer le groupe d’homme qui par accident a tué son mari, juste à la sortie de l’église de son mariage. Elle les a redécouverts. Et souhaite les assassiner un par un. Elle réussira.


Il n’y a pas de suspens dans ce film véritablement, on comprend rapidement ce qui va se passer. Truffaut est ici inspiré d’Hitchcock. Film noir, plan, travelling, lignes droites et surtout le même compositeur de musique de films. La musique a dans ce film un rôle gigantesque…  (Bernard Herrmann) Ambiance dure, noire. La musique est présente par Vivaldi que Julie écoute avant de tuer. Ou bien le concert de musique classique avec Michel Bouquet. On peut donc, au début se sentir un peu frustré par le manque de surprise du scénario. Et pourtant, on accroche et on finit par penser que ce film est fascinant.
Permettez moi une lecture de ce film (qui ne me paraît point trop original…) c’est l’histoire de deux idéaux contrariés. L’idéal féminin contre l’idéal masculin. Depuis cette mort, tout est déglingué… N’est ce pas une histoire de péché originel ? L’église est présente. Par la cérémonie du mariage et par la confession de Julie. (très Hitchcockien cela…) Péché originel… A l’origine du malencontreux assassinat, il y a le jeu des hommes à mettre en joue le coq (la croix aussi…) du clocher de l’église.  C’est le début du malheur… La relation entre les hommes et les femmes en sera bouleversée. Tout va se disloquer. Nous saurons après que le mariage de Julie était le mariage idéal avec le prince charmant. Le seul qu’elle n’ait jamais aimé. Souvenir de l’enfance. (Les verts pâturages de l’enfance…) Paradis perdu. Réalité d’une relation apaisée, amoureuse, solide, fidèle, belle etc…
Mais tout a été tué… Le péché originel ou bien la nature humaine a cassé cette relation. Qui exactement ? L’homme tel qu’il est, cet amateur de femmes et de chasse, célibataire… Le film va développer avec les cinq hommes, ce qu’ils sont devenus, la réalité de ces hommes… tels qu’ils sont et tels qu’ils détruisent l’amour…
Suite à cet accident, Julie va donc les assassiner. De quelle manière ? Elle va les observer, entrer dans leur vie, leur présenter leur idéal féminin et les tuer. Les tuer comme les tue dans les faits leurs péchés et leurs conceptions détraquées de l’idéal féminin.
Vengeance parfaite, d’un idéal à l’autre…

Le premier, joué par Rich est un fiancé. Ancien cavaleur qui a décidé de se poser malgré les conseils de son ami Brialy. On en connait une, on les connait toutes… et pourtant on les veut toutes… Ici, c’est l’idéal de la femme légère que prend Julie. La femme comme tentation sexuelle. Brialy parle justement d’Hemingway, une balle dans la tête si le plaisir n’est plus possible… Cet homme écoute en boucle les bruits de collants de sa future femme quand elle croise les jambes… La futilité est le maître mot… Par un stratagème de Julie, il va mourir écrasé en tombant du balcon. Cette mort ne représente-t-elle pas la chute de l’homme ne pouvant plus aimer vraiment ? (Bonjour, je suis l’apparition..)
Le premier nom est rayé…
Le second est joué par Michel Bouquet, c’est le célibataire rêveur. Julie voit sa chambre, «c’est fou ce qu’on peut savoir d’une personne en voyant sa chambre… » Ici, Julie s’attaque à l’idéalisme. Cet homme vit chichement dans une chambre d’hôtel dans une petite ville des montagnes. Il semble vivre loin des réalités avec une image timide sur les femmes… Idéalisme tragique… Elle l’invite à un concert de musique. Vivaldi par les Fontanarosa. L’homme et la femme se répondent par piano et violoncelle interposés…. Idéalisation d’une communication parfaite, sans violence, sans risque, une relation qui ne soit que beauté… Il la voit comme une apparition. Il l’invite (change sa déco pour faire bien), elle l’empoisonne, c’est l’élixir d’amour… J’ai connu peu de femmes… Soyez ma princesse inaccessible. Vous êtres trop belle pour moi… La femme l’écrase, et finalement l’étouffe comme un poison… Tel est l’élixir d’amour… On met la femme tellement haut et nous même si bas…
Le troisième est joué par Michel Lonsdale. Marié et père d’un fils (Coockie). Il est intéressé par la politique… Julie va jouer sur son ignorance de sa femme et de son fils. Elle va éloigner sa femme, va ensuite se faire passer pour la maîtresse de son fils, va manipuler son fils. Préparer le repas, jouer avec l’enfant à cache-cache. Notamment sous l’escalier… C’est là quelle va le piéger, nous apprenons toute l’histoire… Lonsdale représente l’homme ambitieux et vaniteux, dont la famille est un signe extérieur de richesse et de réussite. Utilitariste (grand-mère inutile), mettant la pression sur son fils. Ne connaissant rien sur lui… Il fait une proposition sexuelle, « les femmes aiment les hommes politiques… ». Il s’enferme avec une femme qui fait tout pour lui, il s’isole de la vie ? il étouffe par sa vanité…
Après tout se complique… Le propos se fait plus compliqué… Plus profond, on parle de l’art, de la justice, et toujours de l’amour… Entre les deux moments, une confession qui confirme Julie dans la colère… (Julie Kohler…)
Le prochain est Fergus joué par Denner. Il est la préfiguration de Morane dans l’homme qui aimait les femmes… (tiens, un titre Hitchcockien encore…) Il permet de comprendre encore mieux ce film ci. Fergus se présente comme un cavaleur, peintre fameux, ne dessinant que des femmes. Il est obnubilé par celles-ci. Leur beauté, les avoir toutes… Le domaine des possibles… Julie voit déjà ses tableaux, elle reviendra avec une coiffure différente…et elle ressemblera comme deux gouttes d’eau aux œuvres du peintre… elle arrive ici comme l’idéal du peintre… qui est son œuvre elle-même qui s’est incarnée… Il tombe pour la première fois amoureux… Pour lui, elle s’habille en Diane. (Vierge vengeresse) Le peintre va la peindre sur le mur près de son lit, travailler avec elle, la mettre par papier jusqu’à ce qu’elle le tue avec les flèches de Diane. Denner joue probablement encore le rôle le plus proche de Truffaut. Il met en scène sa mort. « La flèche plus près de moi… ». Un amour qui ne peut se trouver que dans la mort… Est-ce l’idéal du peintre. Il y aurait beaucoup à creuser... Lien entre le personnage de Denner et Truffaut, réalisateur. Entre l'actrice Jeanne Moreau et sa relation avec le réalisateur... La peinture et le cinéma...
Le cinquième est un truand, que Julie n’a pas eu le temps de tuer une dernière fois, la police la devançant pour l’emprisonner. Après le meurtre de Fergus, elle ira à son enterrement et se fera reconnaître par Brialy. Elle l’a fait pour pouvoir se rapprocher de Delvaux, dans sa prison, qu’elle tuera avec un couteau de cuisine quand était arrivé son tour de servir la soupe. On ne voit pas le meurtre. La vengeance a enfin terminé de parler. La colère et le jugement a enfin fini son travail sur l’homme prisonnier par ce qu’il est…
Il y a décidément beaucoup de force dans ce film. Plastiquement et sur tout ce que nous voyons. Film très noir. Féministe, je ne crois pas du tout… La femme est vue comme folle ou symboliquement. Bras de la vengeance sur le péché… Espoir ? Non, merci mais je reprendrais bien un peu de colère.
Et vous ?

A noter
Lu sur Internet : Les cinq victimes sont prétextes à la description proprement picturale du cadre et des circonstances de leur exécution. D’où le temps accordé au personnage du peintre, Fergus, qui devient aussi réalisateur du film. D’où aussi la logique du dernier meurtre - celui qu’on ne verra pas.
Justice de dieu, justice des hommes… Vendetta…
Fergus ????????
Idéal femmes… Hommes…
Fleurs arrosées
Petit garçon et institutrice

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire