dimanche 22 juin 2014

Méconnaissance - Les origines de la culture René Girard

Petite citation des origines de la culture montrant bien la question de la "méconnaissance" humaine sur ses leviers "sacrificiels", l'origine de la révélation et les risques du déploiement de celle ci.

Les origines de la culture p246 édition hachette pluriel

Ne pensez vous pas que cette méconnaissance actuelle est en quelque sorte un mécanisme de défense, au sens freudien ? Une dénégation qui voile une autocritique trop radicale de l'individu et de la société ? Ce qui, pour la société primitive, était une méconnaissance collective se mue en mécanisme de défense pour l'individu moderne : les erreurs de connaissance, et l'échec qui en découle, constituent des barrières psychologiques qui empêchent l'autocritique ouverte, et par là même l'effondrement de l'identité et des convictions individuelles.


Il y  a un parfait exemple de ce phénomène chez Proust : la grand mère du narrateur montre une certaine réticence à accepter que Swann lui soit socialement supérieur. Elle refuse de voir les faits qui détruiraient la foi et la croyance qu'elle a d'être hiérarchiquement au même niveau que Swann. Elle les rejette en se moquant de cet ami. Et cela se répète tellement souvent que l'on pourrait en faire un modèle anthropologique ! Je pense en effet que vous avez raison : on tient tellement à préserver des idées comme l'individualisme et l'autonomie du désir ! Et c'est la raison pour laquelle les mots "révélation" et "conversion" sont important pour la notion de mimétisme. 
On va vers l'effondrement de la pseudo-science dix-neuviémiste, tout entière fondée sur l'expulsion violente du religieux. Le véritable enjeu, c'est le christianisme, bien entendu, et il est si formidable que les résistances sont acharnées. On va bientôt s'apercevoir que tout ce qu'il y a de vrai dans la philosophie des Lumières, dans la science du XIXème siècle, qui est une critique imparfaite encore du religieux sacrificiel, tout cela vient aussi d'un christianisme pas encore complètement assimilé, mais qui, du fait même qu'il est de mieux en mieux compris, se retourne contre le religieux "sacrificiel" et contre les déformations et adaptations sacrificielles du christianisme, toujours encore systématiquement confondues avec la vérité de celui-ci. Le christianisme est donc aujourd'hui le bouc émissaire de... sa propre révélation.

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