mardi 16 juin 2015

Nous sommes riches. Michel Drac


On peut reprocher beaucoup de choses à Michel Drac...
Mais il tente toujours de rationaliser et de rendre accessible ses arguments.
Il tente dans ce texte, de donner quelques bases de réflexion sur la pauvreté en France et surtout tente de nous convaincre (si besoin est) que la France est encore un pays riche. Ses conclusions ensuite l'orientent vers une vision pessimiste qu'il développe depuis de longues années. Nous ferions une bonne Argentine. Notre situation économique, pour de nombreuses raisons, n'est pas viable et nous ne nous en sortirons pas sans une crise saignante. A discuter... Notamment avec cette vidéo...

Mais restons sur le sujet de la pauvreté

Suite à une conférence sur le monde économique, Drac avait dit des français que nous sommes incroyablement riches. Il fallait 25 min de travail pour se procurer un œuf, il n'en faut plus que trente secondes. Nous sommes riches à un point que nos arrière grands parents ne peuvent pas imaginer. Cela a choqué...

Sommes nous riches ?
L'expension 1982 Deux siècles de révolution industrielle

L'étude, dont est sorti ce tableau, du journal l’expansion nous montre que la rémunération du travail des populations européennes est plus élevé aujourd'hui qu'hier.
Mais qu'est ce que la richesse ? 
Prenons nous la définition de Thoreau, "Un homme est riche de tout ce dont il peut se passer" ?
Ce qui nous ferait penser que toute vie qui s'éloigne de l'idéal monastique est un appauvrissement.
Mais dans notre monde, elle est basée sur la possession. 
La possession de ce dont nous avons besoin pour couvrir nos besoins de base puis les besoins complémentaires puis les besoins à fortes valeurs symboliques, il y a ensuite les biens de production et les biens de production des biens de production.
En ce qui concerne les bien de besoin de base, nous sommes plus riches que dans les sociétés passées.
L'insécurité alimentaire demeure mais personne ne meurt de faim et l'espérance de vie augmente. Plus personne n'est pauvre comme on pouvait l'être au XIXème encore...

I Nous sommes riches alors, mais pourquoi nous sentons nous pauvre ?

Dans les sociétés traditionnelles, 70 % de la rémunération allait vers l'alimentation, le logement (sans aucun réseau raccordé) et peu de dépenses de loisirs.
Aujourd'hui l'alimentation représente 15% de la rémunération. (10% si on enlève le restaurant et la boisson) mais 30% pour le logement.
Nos besoins de base nous coutent plus cher mais la frontière entre biens de base et biens complémentaires et de standing se brouillent. Ce qui était exceptionnel devient de base. Construction mimétique normale .
Si la pauvreté absolue est objective (faim, froid) la pauvreté relative dépend de considération subjectives (notamment son évolution). L'impression d'être moins riches que nos grands parents est trompeuses. Nous serions surpris de la vie dans les 60's....
Première raison de notre sentiment de pauvreté : Nos besoins se sont accrus. L'extension progressive du domaine des bien complémentaires et de standing.

Ensuite après nous être enrichie, nous vivons aujourd'hui une stagnation, et même inversion de sens. (on le voit avec le salaire moyen net). Régression qui fait très mal au cœur d'une population ayant en tête la progression des années 70. Dans un système où sur le plan symbolique, l’appartenance à telle ou telle classe est de moins en moins manifestée par un rôle objectif dans la production et de plus en plus par un niveau de pouvoir d’achat, et où, par ailleurs, on assiste à une opposition entre des baby-boomers qui ont bénéficié de la période de forte croissance et leurs enfants entrés dans la vie active après le début de la stagnation.
Deuxième raison de notre sensation de pauvreté : nous vivons une période de stagnation, voire de lente régression, faisant contraste avec une période d’expansion dont nous gardons collectivement la mémoire.

En parallèle, la répartition des revenus est devenue plus inégalitaire. La croissance des inégalités engendre un décalage de perception de la richesse globale et de sa réalité.
Un bon exemple des mécanismes à l’origine du décalage entre perception de la réalité économique par la majorité et la situation générale réelle est fourni par l’augmentation des loyers. Pour les locataires, c’est un appauvrissement, donc ils ont tendance à penser que tout le monde s’appauvrit – par réflexe, nous projetons tous notre situation sur notre environnement.
Pour les propriétaires, c’est un enrichissement, mais comme la valeur des biens s’est envolée sur le marché, ils ne voient pas que le taux de rendement de leur bien, qui leur paraît normal eu égard à sa valeur de marché, correspond en fait à un loyer très élevé. Donc ils ne se rendent pas forcément compte qu’ils sont, d’une certaine manière, plus riches, puisque leurs revenus augmentent.
Troisième raison de notre sensation de pauvreté : l’accroissement des inégalités fait que la majorité s’appauvrit même quand la collectivité s’enrichit.

Dans le passé, les français pouvaient être plus pauvres en biens de couvertures des besoins de bases et des besoins complémentaires. Ils pouvaient être plus riches en biens de production.
Ils pouvaient entretenir seul leurs biens. Ils maîtrisaient l'intégralité des processus de production. Nous sommes pauvres en comparaison et nous le sentons.
Quatrième raison de notre sensation de pauvreté : notre aliénation s’accentue avec la complexification et la virtualisation des processus économiques.  

Au XIX, les prolétaires trouvait leurs richesses dans la certitude de leur place dans le monde, parce qu'ils le faisaient aussi. La pauvreté était contrecarré par la possession de soi et à travers la dignité que l'on retire de son travail.
Probablement, les contemporains sont plus riches mais ont cette pauvreté psychologique d'un monde qui se fait sans eux, ils sont injustifiés dans ce monde. Le monde n'a plus besoin d'eux. On compensait cette exclusion dans l'ordre de la production par leur intégration dans celui de la consommation. Mais les pauvres, exclus de la production, le sont tout autant de la consommation ; ils n’ont donc plus aucune place dans le cycle de l’échange. Et pour l’être humain, animal social, intelligence communicationnelle, ne plus échanger, c’est être mort vivant.
Cinquième raison de notre sensation de pauvreté : pour des raisons psychologiques, notre aliénation croissante renforce notre sensation générale de frustration.

II Mais au fait qui est pauvre en France ?
Distinguons.
La pauvreté de survie : sa précarité le met en danger         
La pauvreté de vie décente : sa précarité met sa dignité et son confort en péril          
La pauvreté de vie normale : sa vie n'est pas "normale"

Pauvreté de survie, c'est les personnes sans domiciles, environ 0,25%
La pauvreté de vie décente, 3,6 millions de personnes vivent dans des conditions malsaines. Ils se concentrent sur le logement et l'alimentation. Cela représente 5,25% de la population (les mal logés en France). C'est trop mais à l'époque de l'abbé Pierre, le chiffre n'était pas comparable.
La pauvreté de vie normale est marqué par l'INSEE. fraction de la population vivant avec moins de 60% du revenu médian. en France, cela fait 13,5% de la population. 8% si on enlève les deux premières pauvretés.
En France donc, 86,5% de la population n'est pas pauvre.
Drac considère de même que les problèmes de la Grèce sont des problèmes de riches au regard d'un africain. Mais des problèmes quand même. "Mais les français peuvent se plaindre d'insécurité croissante et surtout de vivre dans des sociétés absurdes qui les rend pauvres."

L'avantage d'être relativement riches
En France 5% des français sont millionnaires en dollar. Pour le revenu médian, les français sont dans le tiercé de tête. Le taux d'endettement est raisonnable. Notre état est ruiné mais pas nous.
Les français peuvent faire face
Nous vivons un contexte instable économiquement et géopolitiquement, la zone euro devrait exploser (tellement mal foutu). Mais cette explosion est tellement crainte à raison... mais désirable pour les possibilités politiques permises...
Qui vivra verra...

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