jeudi 27 février 2014

Le misanthrope et départ en carême


Deux, trois considérations sur le misanthrope


Peut on comprendre aujourd'hui l'humour de Molière sur le Misanthrope.
Rions nous encore vraiment et n'est il pas devenu aujourd'hui un certain modèle de l'homme authentique en prise avec les hypocrisies de son temps ?
Mettant de grands espoirs dans la vertu humaine, lucide sur sa médiocrité et probablement sur leur mimétisme, leur méconnaissance de leurs désirs et de leur "géométrie".
Il fustige leurs basses amours, leurs imitations de la mode en ce qui concerne l'art, l'amitié et tout le reste.
Il est en plein paradoxe avec son amour pour Célimène, brillante et médisante. Lui est terriblement jaloux. Embarqué dans les relations humaines, il devient brutal.




Alceste est au prise avec la recherche d'authenticité. Il possède une lucidité très forte sur l'évidente collaboration des hommes à la mode, aux tendances, il a l'intuition du mimétisme humain, au fait que l'homme soit joué par ses désirs et son imitation, aux jeux et comédies des relations humaines. Sa lucidité le fait souffrir. Il ne peut pas accepter de voir les hommes se rendre pieds et poings liés.
Sa recherche d'authenticité sera intégriste. Cormary voit en Alceste Rousseau, l'intégrisme de la morale, la belle âme inquisitrice. Pour lui, toute action deviendra collaboration avec le mal. Le misanthrope s'abstient. Il préfère ne pas. De toute façon, il a pour lui, le bon droit et l'équité. Aimer le bien suffit pour que celui ci s'accomplisse. Orgueil !!! Sens de la supériorité morale.

Pour Girard, Marivaux (qui est très méconnu et incompris selon lui) est une image à postériori du misanthrope. L'homme lucide sur les désirs, les malheurs des relations humaines et des leur inauthenticité mauvaise. Mais il est trop fasciné par son personnage de coquète pour en être véritablement détaché. Marivaux comme le misanthrope sont le signe de la méconnaissance de la méconnaissance du jeu du désir. Leur lucidité fait d'eux des gens malheureux car conscient des jeux humains du désir mais ne comprenant pas combien les personnes sont "innocentes" de ce jeu. Cette méconnaissance leur est renvoyé en pleine tête par leur amour absurde pour la coquète, la femme représentant au mieux le jeu des désirs. Le misanthrope passe à coté de la femme aimante et part dans le désert, le lieu de toutes les inactivités et loin de toutes les relations forcément inabouties.




"Père, pardonne leur car ils ne savent pas ce qu'il font" est peut être la phrase qui est le vaccin contre toute misanthropie. Acceptation de la méconnaissance et départ de l'humilité pour comprendre que cette méconnaissance est, et sera toujours en nous. Bref, la miséricorde...



Je pense aussi au film de Claude Sautet, un coeur en hiver. L'isolement du héros est lié à sa connaissance intime du jeux humain et des désirs. Il perd les femmes aimantes et passionnés, se retrouve dans le désert avant de comprendre sa méconnaissance de ses propres désirs et de son propre mimétisme (le professeur) et la découverte de son humanité blessée ayant besoin de miséricorde.

Le misanthrope, l'homme d'autant plus cruel et mimétique qu'il sait observer le mimétisme partout sauf chez lui. La méfiance du soi s'arrête à celui des autres. Ou encore autrement dit, l'histoire de l'écharde et de la poutre. Ou encore, la nostalgie du royaume de Dieu menant au mépris mimétique et à la fausse authenticité.


La miséricorde sauvera le monde. 


C'est peut-être avec toute cette aventure et ces considérations qu'il faut partir dans un autre désert, le désert des tentations du Christ, le désert de tous les discernements, non pour se perdre mais fait pour s'y retrouver....

Bon Carême à tous, nous nous retrouvons plus tard....

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