La mariée était en noir 1967 François Truffaut
Idéal de vengeance ou vengeance d’idéal
Au début, on ne sait pas vraiment, une femme est
malheureuse. Elle part. En sus de sa famille, elle va commencer à assassiner
des hommes. Précisément, avec imagination et obstination. Nous apprendrons au
fur et à mesure qu’elle souhaite tuer le groupe d’homme qui par accident a tué
son mari, juste à la sortie de l’église de son mariage. Elle les a
redécouverts. Et souhaite les assassiner un par un. Elle réussira.
Il n’y a pas de suspens dans ce film véritablement, on
comprend rapidement ce qui va se passer. Truffaut est ici inspiré d’Hitchcock.
Film noir, plan, travelling, lignes droites et surtout le même compositeur de
musique de films. La musique a dans ce film un rôle gigantesque… (Bernard Herrmann) Ambiance
dure, noire. La musique est présente par Vivaldi que Julie écoute avant de
tuer. Ou bien le concert de musique classique avec Michel Bouquet. On peut
donc, au début se sentir un peu frustré par le manque de surprise du scénario.
Et pourtant, on accroche et on finit par penser que ce film est fascinant.
Permettez moi une lecture de ce film (qui ne me paraît point
trop original…) c’est l’histoire de deux idéaux contrariés. L’idéal féminin
contre l’idéal masculin. Depuis cette mort, tout est déglingué… N’est ce pas
une histoire de péché originel ? L’église est présente. Par la cérémonie
du mariage et par la confession de Julie. (très Hitchcockien cela…) Péché
originel… A l’origine du malencontreux assassinat, il y a le jeu des hommes à
mettre en joue le coq (la croix aussi…) du clocher de l’église. C’est le début du malheur… La relation entre
les hommes et les femmes en sera bouleversée. Tout va se disloquer. Nous
saurons après que le mariage de Julie était le mariage idéal avec le prince
charmant. Le seul qu’elle n’ait jamais aimé. Souvenir de l’enfance. (Les verts
pâturages de l’enfance…) Paradis perdu. Réalité d’une relation apaisée,
amoureuse, solide, fidèle, belle etc…
Mais tout a été tué… Le péché originel ou bien la nature
humaine a cassé cette relation. Qui exactement ? L’homme tel qu’il est,
cet amateur de femmes et de chasse, célibataire… Le film va développer avec les
cinq hommes, ce qu’ils sont devenus, la réalité de ces hommes… tels qu’ils sont
et tels qu’ils détruisent l’amour…
Suite à cet accident, Julie va donc les assassiner. De quelle
manière ? Elle va les observer, entrer dans leur vie, leur présenter leur
idéal féminin et les tuer. Les tuer comme les tue dans les faits leurs péchés
et leurs conceptions détraquées de l’idéal féminin.
Vengeance parfaite, d’un idéal à l’autre…
Le premier, joué par Rich est un fiancé. Ancien cavaleur qui
a décidé de se poser malgré les conseils de son ami Brialy. On en connait une,
on les connait toutes… et pourtant on les veut toutes… Ici, c’est l’idéal de la
femme légère que prend Julie. La femme comme tentation sexuelle. Brialy parle
justement d’Hemingway, une balle dans la tête si le plaisir n’est plus
possible… Cet homme écoute en boucle les bruits de collants de sa future femme
quand elle croise les jambes… La futilité est le maître mot… Par un stratagème
de Julie, il va mourir écrasé en tombant du balcon. Cette mort ne
représente-t-elle pas la chute de l’homme ne pouvant plus aimer vraiment ?
(Bonjour, je suis l’apparition..)
Le premier nom est rayé…
Le second est joué par Michel Bouquet, c’est le célibataire
rêveur. Julie voit sa chambre, «c’est fou ce qu’on peut savoir d’une personne
en voyant sa chambre… » Ici, Julie s’attaque à l’idéalisme. Cet homme vit
chichement dans une chambre d’hôtel dans une petite ville des montagnes. Il
semble vivre loin des réalités avec une image timide sur les femmes… Idéalisme
tragique… Elle l’invite à un concert de musique. Vivaldi par les Fontanarosa.
L’homme et la femme se répondent par piano et violoncelle interposés….
Idéalisation d’une communication parfaite, sans violence, sans risque, une
relation qui ne soit que beauté… Il la voit comme une apparition. Il l’invite (change
sa déco pour faire bien), elle l’empoisonne, c’est l’élixir d’amour… J’ai connu
peu de femmes… Soyez ma princesse inaccessible. Vous êtres trop belle pour moi…
La femme l’écrase, et finalement l’étouffe comme un poison… Tel est l’élixir
d’amour… On met la femme tellement haut et nous même si bas…
Le troisième est joué par Michel Lonsdale. Marié et père
d’un fils (Coockie). Il est intéressé par la politique… Julie va jouer sur son
ignorance de sa femme et de son fils. Elle va éloigner sa femme, va ensuite se
faire passer pour la maîtresse de son fils, va manipuler son fils. Préparer le
repas, jouer avec l’enfant à cache-cache. Notamment sous l’escalier… C’est là
quelle va le piéger, nous apprenons toute l’histoire… Lonsdale représente
l’homme ambitieux et vaniteux, dont la famille est un signe extérieur de
richesse et de réussite. Utilitariste (grand-mère inutile), mettant la pression
sur son fils. Ne connaissant rien sur lui… Il fait une proposition
sexuelle, « les femmes aiment les hommes politiques… ». Il
s’enferme avec une femme qui fait tout pour lui, il s’isole de la vie ? il
étouffe par sa vanité…
Après tout se complique… Le propos se fait plus compliqué…
Plus profond, on parle de l’art, de la justice, et toujours de l’amour… Entre
les deux moments, une confession qui confirme Julie dans la colère… (Julie
Kohler…)
Le prochain est Fergus joué par Denner. Il est la
préfiguration de Morane dans l’homme qui aimait les femmes… (tiens, un titre
Hitchcockien encore…) Il permet de comprendre encore mieux ce film ci. Fergus
se présente comme un cavaleur, peintre fameux, ne dessinant que des femmes. Il
est obnubilé par celles-ci. Leur beauté, les avoir toutes… Le domaine des
possibles… Julie voit déjà ses tableaux, elle reviendra avec une coiffure
différente…et elle ressemblera comme deux gouttes d’eau aux œuvres du peintre…
elle arrive ici comme l’idéal du peintre… qui est son œuvre elle-même qui s’est
incarnée… Il tombe pour la première fois amoureux… Pour lui, elle s’habille en
Diane. (Vierge vengeresse) Le peintre va la peindre sur le mur près de son lit,
travailler avec elle, la mettre par papier jusqu’à ce qu’elle le tue avec les
flèches de Diane. Denner joue probablement encore le rôle le plus proche de Truffaut. Il met en scène sa mort. « La flèche plus près de moi… ».
Un amour qui ne peut se trouver que dans la mort… Est-ce l’idéal du peintre. Il
y aurait beaucoup à creuser... Lien entre le personnage de Denner et Truffaut, réalisateur. Entre l'actrice Jeanne Moreau et sa relation avec le réalisateur... La peinture et le cinéma...
Le cinquième est un truand, que Julie n’a pas eu le temps de
tuer une dernière fois, la police la devançant pour l’emprisonner. Après le
meurtre de Fergus, elle ira à son enterrement et se fera reconnaître par
Brialy. Elle l’a fait pour pouvoir se rapprocher de Delvaux, dans sa prison, qu’elle
tuera avec un couteau de cuisine quand était arrivé son tour de servir la soupe.
On ne voit pas le meurtre. La vengeance a enfin terminé de parler. La colère et
le jugement a enfin fini son travail sur l’homme prisonnier par ce qu’il est…
Il y a décidément beaucoup de force dans ce film.
Plastiquement et sur tout ce que nous voyons. Film très noir. Féministe, je ne
crois pas du tout… La femme est vue comme folle ou symboliquement. Bras de la vengeance sur le
péché… Espoir ? Non, merci mais je reprendrais bien un peu de colère.
Et vous ?
A noter
Lu sur Internet : Les cinq victimes sont prétextes à la
description proprement picturale du cadre et des circonstances de leur
exécution. D’où le temps accordé au personnage du peintre, Fergus, qui devient
aussi réalisateur du film. D’où aussi la logique du dernier meurtre - celui
qu’on ne verra pas.
Justice de dieu, justice des hommes… Vendetta…
Fergus ????????
Idéal femmes… Hommes…
Fleurs arrosées
Petit garçon et institutrice
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire