Je trouve que Mendelssohn a une place particulière dans la musique classique. Il est une star, nous avons tous entendu son nom, il est diffusé sans cesse, il possède quelques tubes, mais on le saisit assez peu. Nous avons du mal à le décrire.
Sa vie aussi est particulière. Enfant prodige, à 12 ans, il traduit du latin et publie ses traductions au même age. Goethe admire ses talents, il peint admirablement, il chante tout aussi bien. Son père est un riche banquier vivant à Berlin au cœur de la vie culturelle et mondaine, c'est l'époque de Hegel, de Heine (et de Clausewitz...). Il reçoit une éducation soignée. Jeune homme, à vingt ans, il est le premier chef d'orchestre à jouer du Bach depuis la mort de celui-ci (cela fait 80 ans...) Il se passionne pour Haendel. Il admire Schubert, il voyage en Italie, en Angleterre, en France. Il croise Chopin, Liszt, Berlioz, Rossini.... C'est un brillant étudiant en sciences humaines, philologie, philosophie, géographie, zoologie. Ses œuvres le rendent célèbres, il est nommé par le roi de Prusse pour organiser la vie musicale.. Il est célèbre, heureux avec son épouse et leurs cinq enfants.
Que croit cet homme, en quoi pense t- il ? Je ne sais pas trop. Cela m'intéresserait de le savoir... Était il Hegelien, Clausewitzien, romantique, nostalgique de l'age baroque ? Romantique ? Classique ? Je le sens à la frontière et déchiré. Ses chorales sont incroyablement proche de Bach mais en même temps, on sent un ajout romantique dans ses harmonies sereines et sobre.
Il est déchiré entre la foi juive et protestante. Son grand père Moses Mendelssohn est le théoricien du judaïsme réformé, "des lumières" et aura une influence considérable dans le judaisme européen. Son père l'éduquera sans religion avant lui-même de se convertir et d'emmener Felix dans une foi chrétienne sincère et forte comme le signale les oratorios Paulus, Elijah, les psaumes ou encore la symphonie n°2.
Déchiré aussi par la dépression, comme lors de la mort de son père et surtout celle de sa soeur Fanny, amie, âme sœur et compositrice elle aussi. Dépression qui sera suivi (conséquence ?) de sa mort par apoplexie à 38 ans en 1949. Cette annonce attriste toute l'Europe.
Cet article pense que cet âme trop pure, trop successful, trop bénie des dieux n'étaient pas prêtes pour le malheur. J'ai l'intuition que c'est un grave malentendu. Cet homme a connu l'humiliation napoléonienne, une éducation très stricte et prête à toutes les guerres et les combats de l'intelligence. Il est au cœur du combat entre religion et philosophie, il doit voir la montée en puissance de la Prusse revancharde. Non Mendelssohn n'est pas un ange descendu des cieux, comme tout génie, (et même le génie de la clarté musicale) est marquée par l'ambivalence de la vie, de son bonheur, de sa tragédie et sa sensibilité (confirmé par Thierry Escaich parlant du paradoxe entre la clarté des mélodies de Mendelssohn et sa récurrente dépression). Il y a des gouffres. Sa capacité d'être "mozartien" comme disent beaucoup (traduire par capable d'être guilleret dans ce monde de douleur) est en fait un compliment dont ceux qui l'énoncent ne voient guère. C'est l'homme capable de dire la beauté transcendante du moment présent. Trop parfait ? N'entendez vous pas les gouffres de cette musique si majestueusement construite et si efficace sensoriellement ? Cet homme ne jouait il pas au bras de fer permanent avec le mal... Ne fut il pas mort d'avoir trop combattu ?
A écouter.
Chansons sans paroles.
Elijah
Paulus
Lobesgang
Lauda Sion
Octuor
Et encore tant à découvrir
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